Maîtriser l’art de la négociation : une compétence stratégique pour réussir en business
Arnaud DROH
Dans leur excellent ouvrage « Négociator », les experts de la négociation complexe Laurent Combalbert et Marwan Mery livrent des enseignements puissants issus de dizaines d’années de terrain, dans les sphères du business, de la diplomatie, du social et même de la gestion de crise.
Loin des recettes toutes faites, ils posent une conviction forte : négocier est une compétence-clé, essentielle dans un monde incertain. Une compétence qui ne relève ni de l’instinct ni du charisme, mais d’une préparation rigoureuse, d’une posture humaine et d’une capacité d’improvisation structurée. Voici quelques enseignements que les entrepreneurs et dirigeants gagneraient à intégrer.
La négociation : bien plus qu’un talent, une compétence à cultiver
L’un des messages centraux du livre est que la négociation n’est pas réservée aux profils « doués », ni aux commerciaux ou aux avocats d’élite. Elle est un savoir-faire qui s’apprend et se pratique dans tous les domaines de la vie professionnelle.
Chaque conflit, désaccord ou tension est une opportunité potentielle de création de valeur, à condition de savoir comment l’aborder. Négocier, ce n’est pas imposer ou céder : c’est construire une solution acceptable pour toutes les parties.
À retenir : Dans une entreprise, tout collaborateur devrait être formé à la négociation, pas seulement les commerciaux.
Complexité : le nouveau terrain de jeu du business
Le livre insiste aussi sur une distinction capitale : notre monde n’est pas simplement compliqué, il est complexe. Cela signifie que les éléments sont nombreux, mais surtout imprévisibles, changeants, humains.
Dans un tel contexte, les anciennes méthodes de négociation (précalculées, figées, rationnelles) ne suffisent plus. Il faut apprendre à négocier dans l’incertitude, en acceptant de ne pas tout maîtriser.
Inspiration business : L’adaptabilité et la lucidité sont aujourd’hui des leviers bien plus puissants que le rapport de force.
PACIFICAT : un cadre de réflexion puissant en 9 étapes
Les auteurs ont développé un outil structurant : le référentiel PACIFICAT, utilisé dans plus de 40 pays. Il propose 9 étapes pour encadrer toute négociation complexe, sans jamais enfermer le négociateur dans un système rigide. Il ne donne pas des réponses toutes faites, mais des questions puissantes à se poser à chaque étape :
- Pouvoir & Leadership
Exemple : Un dirigeant prend conscience qu’il n’a pas l’autorité finale pour signer un partenariat. Il identifie qui, dans l’organisation, a le vrai pouvoir décisionnel.
- Analyse du Contexte
Exemple : Une start-up évalue que son client traverse une restructuration interne, ce qui explique la lenteur des négociations.
- Cartographie des Acteurs
Exemple : Avant un appel d’offres, une équipe identifie tous les intervenants-clés : décideur, prescripteur, utilisateur, opposant caché.
- Identification de la Stratégie
Exemple : Une entreprise choisit une stratégie d’influence indirecte en passant par un réseau de partenaires pour convaincre un client difficile.
- Formation de l’équipe
Exemple : Pour négocier un contrat international, une PME constitue une équipe mixte : un expert technique, un juriste, et un commercial bilingue.
- Influence & Relation
Exemple : Lors d’un échange tendu, un négociateur adopte une posture d’écoute active pour désamorcer l’agressivité et rétablir un climat constructif.
- Clôture & Décision
Exemple : Au moment de signer, le négociateur résume les points d’accord, anticipe les objections de dernière minute, et propose un plan d’action clair.
- Apprentissage & Débriefing
Exemple : Après l’échec d’une vente, l’équipe analyse ce qui a bloqué : préparation insuffisante, mauvaise évaluation des besoins réels du client.
- Transmission des savoirs
Exemple : L’entreprise crée une fiche retour d’expérience partagée avec les autres équipes, pour éviter que les mêmes erreurs ne se répètent.
Transformez ce modèle en “checklist” de préparation avant chaque négociation stratégique.
Les étapes vont de la préparation stratégique à la clôture et au débriefing, avec une logique claire :
- 70 % de préparation (analyse du pouvoir, du contexte, des acteurs, des stratégies, de l’équipe),
- 30 % d’improvisation éclairée (influence, clôture, apprentissage).
À essayer : Se poser les « bonnes questions » avant d’arriver à la table de négociation change souvent l’issue.
Le conflit : moteur d’innovation, pas un obstacle
Combalbert et Mery renversent une idée bien ancrée : le conflit ne doit pas être évité, il doit être valorisé.
Un désaccord bien géré est un déclencheur de créativité, d’innovation, de croissance collective. À l’inverse, la soumission ou l’évitement peuvent nuire à la performance durable. Encore faut-il apprendre à gérer les conflits avec assertivité, écoute et stratégie.
Transformer un blocage en tremplin est souvent une question de posture, pas de rapport de force.
L’art de la relation avant la position
Autre leçon forte : la relation prime sur la position. Ce n’est pas en martelant ses arguments qu’on obtient un accord durable, mais en comprenant les motivations profondes de l’autre.
Le modèle des auteurs s’appuie notamment sur les Tactical Listening Skills (TLS), une écoute active structurée qui permet de détecter les signaux faibles, les points de blocage cachés, les leviers psychologiques de sortie de crise.
Inspiration : Influence = écoute + alignement + intégrité.
En conclusion : la négociation, culture d’avenir
Le message de Négociator est limpide : dans un monde où tout change vite, où l’humain reste la plus grande variable, la négociation devient un savoir de leadership.
Développer une culture de la négociation, c’est renforcer l’intelligence collective, la qualité des relations internes et la capacité à grandir dans l’adversité.
Et si, pour faire progresser votre business, vous commenciez par mieux négocier ?
